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Perspectives
Le traitement de remplacement
dans l’hémophilie
Les concentrés des facteurs VIII et IX
ont révolutionné la prise en charge
des patients hémophiles A et B. Les
nombreux cas de SIDA et d’hépatites B
et C liés à l’administration de facteurs
VIII et IX d’origine plasmatique
(
faut-il rappeler l’histoire du sang
contaminé), la maladie de la vache
folle, ou encore le risque immunogène
ont motivé la mise au point de
facteurs VIII et IX recombinants,
puis ensuite le raffinement de leurs
procédés de fabrication, qui se font
sans l’intervention de toute protéine
humaine ou animale. Par rapport
aux autres protéines, le facteur
VIII se distingue par une extrême
immunogénicité, c’est-à-dire cette
propriété à induire le développement
d’anticorps neutralisants. A l’heure
actuelle, le développement d’anticorps
inhibiteurs dirigés contre le facteur
VIII représente la complication la plus
redoutée et sévère du traitement
de remplacement de l’hémophilie.
Non seulement, elle réduit l’effet
thérapeutique du facteur VIII, mais
sa prise en charge est laborieuse
et occasionne d’importants coûts
(
tolérance immune, agents de
by-pass…). Parmi les facteurs de
risque d’apparition de ces auto-
anticorps, le passage répété d’un
concentré à l’autre est fréquemment
retenu. C’est dire si l’immunogénicité
de ces biomédicaments apparaît
cruciale sur le plan de leur sécurité.
Pour les biosimilaires
du
facteur
VIII,
qui devraient être développés dans
l’avenir, tout devra être mis en œuvre
pour s’assurer que leur immungénicité
est comparable à celle des concentrés
actuellement disponibles. Les instances
réglementaires européennes ont tenu
compte de cette réalité. Elles ont
précisé que les autorisations de mise
sur le marché des biosimilaires ne sont
délivrées que sur la base non seulement
d’études pharmacodynamique et
pharmacocinétiques
(
génériques),
mais aussi d’études cliniques pour
démontrer la similarité de l’efficacité
et de la sécurité.
Se pose également l’éventuel problème
de traçabilité. En effet, lesmédicaments
génériques sont prescrits sous forme
de « DCI » ou dénomination commune
internationale. Cette dénomination,
quasi anonymisée, ne permet pas
d’identifier le biomédicament reçu
par le patient. Les spécialistes de
l’hémophilie et de la transfusion sont
bien conscients de l’importance de
notifier dans le dossier des patients
les caractéristiques des traitements
administrés (identification du produit,
numéro de lot). En outre, comme des
effets secondaires peuvent apparaître
avec un temps de latence assez long,
des procédures de pharmacovigilance
précises (comprenant un plan de
gestion du risque) doivent être
organisées dès la mise à disposition
des biomédicaments et de leurs
similaires.