Résumé
Par Lize F.D. van Vulpen, Iris M. Wichers, Rolf T. Urbanus et Karin P. M van Galen.
Les saignements sont fréquents dans la population générale et ne sont pas toujours reconnus comme symptôme d'un trouble de la coagulation.
Les femmes souffrant de troubles de la coagulation sont particulièrement vulnérables en raison des pertes de sang pendant les règles et l'accouchement. Une bonne anamnèse sanguine et familiale est dès lors très importante pour détecter un éventuel trouble de la coagulation sous-jacent. Chez les patientes souffrant de troubles de la coagulation, on peut éviter des complications hémorragiques potentiellement mortelles en établissant un plan de traitement individualisé et en soutenant temporairement l'hémostase.
Sur la base de 31 articles pertinents, les auteurs de cet article ont examiné quelles sont les options diagnostiques en cas de suspicion de trouble de la coagulation.
Reconnaissance d’un trouble de la coagulation.
Les patientes présentant des saignements se tournent vers différents prestataires de soins tels que médecin généraliste, gynécologue, ORL, dentiste, ... Des chercheurs américains ont constaté qu’il se passe souvent deux ans avant qu'un diagnostic de la maladie de Willebrand ne soit posé. Chez la majorité des femmes chez qui les saignements menstruels abondants étaient la manifestation d'un trouble de la coagulation sous-jacent, le diagnostic peut prendre jusqu'à huit ans. Souvent, les patientes atteintes d'un trouble de la coagulation ne trouvent pas anormal le nombre d'épisodes de saignement, car la plupart des troubles de la coagulation sont héréditaires et plusieurs membres de la famille souffrent des mêmes problèmes. Une identification précoce est importante si l’on veut proposer aux femmes atteintes de saignements menstruels abondants un traitement ciblé.
Anamnèse.
Il est très important d’obtenir un historique détaillé des saignements et des antécédents familiaux d’une patiente présentant une suspicion de trouble de la coagulation. Les prestataires de soins de santé peuvent utiliser l'outil d'évaluation des saignements (BAT), qui est un questionnaire permettant d'évaluer la gravité de la tendance aux saignements. Un score total élevé à ce questionnaire augmente la probabilité d'un trouble sous-jacent de la coagulation. Un score « normal » ne signifie pas qu'un trouble léger de la coagulation ait été exclu. Ce questionnaire constitue la clé de voûte d'un historique complet et structuré des saignements. Un « self BAT » a également été développé, que les patientes peuvent remplir en ligne. La Société néerlandaise des patients hémophiles a mis au point un symptom checker spécialement destiné aux femmes et aux jeunes filles. (www.bloedstollling-bij-vrouwen.nl).
BAT Tool :
https://bleedingscore.certe.nl/
Tests de coagulation.
Si, sur la base de l'anamnèse, on soupçonne une tendance accrue aux saignements ou s'il y a différents types de saignements ou de (post-)saignements excessifs inexpliqués, il y a lieu d’effectuer des tests de laboratoire afin de déterminer l'hémostase. On fait ici une distinction entre les anomalies hémostatiques primaire et secondaire. Le type de saignement peut fournir une indication quant au défaut d'hémostase sous-jacent. Les troubles de l'hémostase primaire se caractérisent par des hémorragies muqueuses et des saignements importants en cas de traumatisme ou d'intervention chirurgicale. Les troubles de l'hémostase secondaire se traduisent plus souvent par des saignements prolongés et tardifs, ainsi que par des saignements des tissus profonds tels que musculaires et articulaires. Cependant, les symptômes peuvent se chevaucher.
L'examen de l'hémostase primaire consiste initialement à déterminer la numération plaquettaire et l'activité du facteur de von Willebrand (FVW). Pour étudier la fonction plaquettaire, on utilise l'agrégométrie par transmission lumineuse (LTA). On peut également étudier la sécrétion d'ATP et d'ADP dans les plaquettes. Une analyse plus approfondie peut nécessiter des études spécialisées telles que la cytométrie en flux.
En cas d'hémostase secondaire, la détermination du TCA et du TP est initialement suffisante. L'allongement du TCA ou du TP peut indiquer des déficiences sous-jacentes en facteurs de coagulation. Cependant, les déficiences légères en facteurs de coagulation, par exemple une forme légère d'hémophilie A, peuvent passer inaperçues. Des déterminations supplémentaires de l'activité des facteurs de coagulation doivent être effectuées s'il existe une forte suspicion d'altération de l'hémostase secondaire chez un patient présentant un TCA et un TP non divergents. Pour ne pas manquer un diagnostic d'hémophilie A acquise, l'activité du FVIII doit également toujours être déterminée chez ces patients.
Recherche sur l’ADN.
De nos jours, il est de plus en plus courant d’utiliser la recherche sur l’ADN. Par contre, cette démarche a moins de sens pour les patientes dont les tests de coagulation ne révèlent pas d’anomalie.
Conclusion
Une fois qu’un diagnostic de trouble de la coagulation a été posé, un traitement individualisé doit être mis en place dans un centre de traitement spécialisé dans l'hémostase. En raison de la sensibilité limitée des questionnaires et des tests de diagnostic, il peut être compliqué de poser le bon diagnostic. Par exemple, chez une patiente présentant un léger déficit en FVIII, les résultats du dosage du TCA et du TP ainsi que des tests de la fonction plaquettaire sont non divergents. Il est également difficile de poser le bon diagnostic chez les patientes présentant un léger déficit en facteurs de coagulation ou une tendance aux saignements mal comprise, alors même qu'un plan de traitement individuel et une évaluation correcte du risque de complications hémorragiques sont également bénéfiques pour ces patientes. En cas de doute, il est conseillé de consulter un spécialiste de la coagulation sanguine.
L’association tient à remercier Mme Sarah De Witte pour la création de ce résumé.
Source article : Ned. Tijdschrift geneeskunde 2020;164:D4181